La sous-traitance en permanence téléphonique – Aspect juridique

La sous-traitance en permanence téléphonique – Aspect juridique

I. Définition

La sous-traitance est l’opération par laquelle une entreprise, « le donneur d’ordre », confie le soin à une autre entreprise « le sous-traitant » d’exécuter pour elle et selon un cahier des charges défini une partie de son activité destinée au donneur d’ordre ou exécutée pour son propre compte.

La sous-traitance peut être divisée en deux catégories, selon les raisons qui conduisent à y recourir :

  • Sous-traitance de spécialité : lorsqu’une entreprise sous-traite parce qu’elle ne dispose  pas des équipements ou des compétences nécessaires pour effectuer la prestation en cause
  • Sous-traitance de capacité : lorsqu’une entreprise  sous-traite parce qu’elle n’a pas le temps ou, temporairement, pas les équipements ou compétences pour effectuer elle-même les prestations demandées

Une autre raison à la sous-traitance, surtout dans le cas des indépendant(e)s, est bien évidemment le fait de pouvoir se libérer du temps. Lorsque l’on travaille seul(e) et que l’on est obligé(e) de rester proche du téléphone de 8h à 18h, il est bien évident que l’on a parfois besoin de souffler.

Pour Nicolas Gardian, Alliance Secrétariat, « Sous-traiter permet de faire une coupure car la permanence téléphonique est une activité prenante. »

De plus, pouvoir déléguer ses lignes à quelqu’un d’autre, cela permet  de se dégager du temps libre pour soi ou pour sa famille, mais aussi pour faire autre chose : « Déléguer me permet d’avoir du temps libre, mais aussi de faire d’autres prestations comme le secrétariat ou la retranscription audio et de développer ainsi une autre clientèle variée » nous dit Eva Saracino (Eva Secrétariat).

Du côté du délégataire, avoir recours à la sous-traitance peut être un moyen de se libérer de certaines contraintes, comme en témoigne Karine Robin de KR Call : « Au début de mon activité, j’ai trouvé cela sympa d’être sous-traitante car je n’étais pas confrontée directement au client final et je me libérais des soucis d’impayés éventuels ».

 

   II. Caractéristiques

La sous-traitance est soumise aux règles juridiques du contrat d’entreprise. La sous-traitance en permanence téléphonique fait partie de la sous-traitance de services en général qui n’est régie par aucun texte de loi ayant force obligatoire.

Cependant, le contrat de sous-traitance qui régit la relation entre le donneur d’ordre et le sous-traitant doit respecter certaines conditions :

  • Il doit exister au préalable un contrat de prestation de service entre le donneur d’ordre et son client
  • Les parties au contrat doivent être des professionnels (personnes physiques ou sociétés)
  • Le contrat de sous-traitance doit être rattaché au contrat de prestation de service passé par le donneur d’ordre avec son client
  • Le donneur d’ordre conserve la responsabilité du contrat passé avec son client

Le prestataire de service principal (qui devient le donneur d’ordre) est libre de sous-traiter une partie de la prestation qui lui est confiée par son client. Mais le contrat de prestation de service peut contenir une clause interdisant le recours à la sous-traitance ou bien soumettre la validation du contrat de sous-traitance à certaines exigences, comme l’accord du client sur le choix du sous-traitant.

Dans tous les cas, le prestataire de service doit faire accepter le sous-traitant par son client et lui faire agréer les conditions de paiement du sous-traitant (en principe, le prestataire de service paye directement son sous-traitant). La demande d’acceptation n’est soumise à aucune forme particulière. L’idéal est de la faire figurer par écrit, soit dans une clause du contrat, si le prestataire est connu ; soit dans un avenant au contrat. Il n’est pas possible de faire accepter  par avance des sous-traitants s’ils n’ont pas encore été choisis.

Pour certains clients, le recours à la sous-traitance de leur prestataire peut être problématique, voire rédhibitoire. Karine Robin en témoigne d’ailleurs en précisant que certains de ces clients exigent de savoir lorsqu’elle s’absente. Autre exemple avec Nathalie Mordillo, Nathcall : « Certains de mes clients refusent de travailler avec mes sous-traitantes et préfèrent soit récupérer eux-mêmes leurs lignes lorsque je m’absente, soit laisser le répondeur ».

 

III. Contenu du contrat

Même si un contrat de sous-traitance doit s’adapter à chaque situation, il doit néanmoins comporter les éléments suivants :

  • objet du contrat (définition précise des prestations)
  •  prix
  • délais de paiement et pénalités de retard
  • clause d’indexation ou de renégociation du contrat (important dans le cas où les conditions économiques du contrat principal changent)
  • date de conclusion et d’effet du contrat
  •  modalités d’exécution des prestations
  • modalités de contrôle des prestations
  •  garanties (limitations de responsabilités)
  •  conséquences de la non-conformité des prestations
  • confidentialité (sur clients, prestations, documents…)
  • modalités de modification du contrat
  • modalités de rupture du contrat
  • tribunal compétent et droit applicable
  • clause de non-concurrence (interdiction de démarcher les clients pendant le contrat et  pendant une durée déterminée après le contrat) + indemnités en cas de violation de la clause
  • obligations des parties
  • clause sur le travail dissimulé

 

Je ferai ici un aparté sur ce dernier élément. Le risque majeur est la frontière entre sous-traitance et travail dissimulé. Le critère essentiel de distinction est le lien de subordination entre les personnes qui exécutent la prestation et le donneur d’ordre. Concernant les travailleurs indépendants, depuis la loi du 1er août 2003 sur l’initiative économique, le travail dissimulé existe s’il existe des preuves permettant d’établir que le donneur d’ordre a intentionnellement agi ainsi pour se soustraire aux obligations qui auraient pesé sur lui en tant qu’employeur. En clair, si un client (ou votre employeur) vous demande de vous mettre à votre compte, mais vous fait travailler à temps plein pour lui et vous dicte tous vos faits et gestes, il y a travail dissimulé. Cette dérive a notamment été constatée par certains employeurs qui demandent à leurs salariés de démissionner pour s’installer en auto-entreprise et les font travailler comme auparavant. Cela leur éviter de payer des cotisations les charges. Méfiance, donc…

 

Pour revenir sur le contrat de sous-traitance, si la majorité des entreprises de permanence téléphonique signent des contrats de sous-traitance, certains préfèrent la confiance. Or, en affaires, la confiance peut amener à des situations complexes.

Mieux vaut se protéger en formalisant par écrit tous les contrats que l’entreprise conclue.

Votre partenaire du jour, en qui vous avez toute confiance, peut parfaitement demain, démarcher vos clients, vous discréditer auprès d’eux dans le seul but de faire augmenter leur chiffre d’affaires. Qu’est-ce qui l’en empêche puisque vous n’avez pas signé de contrat avec lui ? L’honnêteté ? La déontologie ? En affaires, il est plus prudent de formaliser les relations par écrit pour éviter les désagréments.

D’ailleurs, de nombreux entrepreneurs sont méfiants lorsqu’ils choisissent un sous-traitant et peuvent même avoir des freins à y recourir. Peur de perdre des clients par manque professionnalisme des sous-traitants ou parce qu’ils décideront de travailler avec la sous-traitante en direct. Pour éviter ces désagréments, une seule solution : conclure avec ces sous-traitantes des contrats verrouillés : « Je fais signer à mes sous-traitantes des contrats « bétons » et celui-ci précise que tout démarchage de ma clientèle est interdit, et je leur reprécise verbalement en début de collaboration » indique  Aline Clot-Tassart, @lsecret’online.

Pour Nicolas Gardian, Alliance Secrétariat : « Le contrat de sous-traitance est indispensable. Il protège les deux parties ».

 La loi est là pour nous protéger, mieux vaut donc l’utiliser à bon escient. Prendre le temps de rédiger un contrat de sous-traitance adapté à sa situation est essentiel. Il ne faut d’ailleurs pas hésiter à se faire aider d’un professionnel pour cela. Certains s’y refuseront, prétextant qu’un tel conseil coûte cher. Mais n’oubliez pas qu’il vaut mieux prévenir que guérir !

Merci aux professionnels qui ont témoigné dans cet article.

Nicolas Gardian, Alliance Secrétariat : alliance-secretariat.fr

Eva Saracino, Eva Secrétariat : [site désactivé]

Aline Culot-Tassart, @lsecret’online : www.alsecretonline.fr

Karine Robin, KR Call : www.krcall.fr

 

 

Sources :

www.apce.com

www.expertsa.fr

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